Rencontres journalisme et humanitaire
20 novembre 2012Un reporter, présent sur le terrain fait face à une misère et un paysage désolants. Parvient-il à garder son objectivité et son calme ? C’était l’un des points centraux de discussions lors de la conférence « Journalisme et Humanitaire » organisée par l’Université Lumière de Lyon 2.
Un reporter reste un être humain, doté de sentiments et de compassion. Réussit-il, malgré un contexte difficile, à fournir des écrits qui reflètent vraiment la réalité de la situation ? Ou alors se laisse-t-il influencer par ce qu’il voit et entend ? Ethiquement, un journaliste a un devoir d’objectivité et doit normalement rapporter des informations basées sur ce qu’il voit et non sur son propre ressenti. Il est tout aussi juste de s’interroger sur l’emploi de journalistes par des ONG. Ceux-ci, soucieux de donner des rapports et photos chocs, privilégient maintenant l’envoi d’anciens grands reporters et photojournalistes sur le terrain. Des personnes d’expérience, plus à même d’amener la phrase ou la photo choc. Courrier International précise d’ailleurs que les unes des grands journaux viennent de plus en plus d’ONG. Comment remplir ses fonctions de journalistes aujourd’hui ? Peut – on faire objectivement son travail dans une zone et un contexte difficiles ?
Pierre Micheletti évoque quant à lui la sacro-sainte domination des journaux occidentaux. Pourquoi serait-ce eux les plus lus et les plus écoutés, souvent cités comme référents ? Slate Afrique constate que la plupart des grandes agences de presse internationales ont un représentant pour 10 ou 15 pays d’Afrique. Constat regrettable si on considère la diversité présente dans les pays africains que ce soit au niveau ethnique, linguistique ou économique. L’école journalistique occidentale est-elle donc la meilleure et la plus fiable ? Pourquoi ne pas privilégier aujourd’hui l’emploi de correspondants locaux qui seraient plus à même de couvrir des évènements et d’avoir des informations utiles? Ne devrait-on pas plus être à l’écoute des journalistes locaux, potentiellement plus aptes à comprendre et analyser une situation qu’ils connaissent mieux ? Des journalistes qui ont passé leur vie dans ce pays et non pas 5 jours n’auront –ils pas des propos plus nuancés et plus approfondis ?
Des correspondants locaux peuvent-il être des humanitaires ? Peuvent-ils dans leur position aborder de façon ajustée la situation qu’ils côtoient quotidiennement ? Est-ce que un humanitaire peut être à la fois acteur et rapporteur d’informations ? Un journaliste de formation ne serait –il pas plus à même de faire ce travail ? Philippe Ryfman regrette le croisement de ces deux fonctions. Les « plaidoyers » de ces ONG pour chercher du financement en Europe peuvent-ils être rédigés par des journalistes et surtout publiés dans des médias ? Où est la limite entre ces gens qui sont un coup journalistes, un coup humanitaires ? Quand certains pays expulsent certaines ONG les soupçonnant de divulguer des informations à la presse, que faire ? Quelle est la priorité ? Prendre le risque que les humanitaires soient évacués de pays qui ont grand besoin de leur aide ? Ou alors renseigner la communauté internationale sur la situation du dit pays ?
Olivier François