Ca veut dire quoi être Charlie en aout 2015 ?
6 août 2015Ce discours aux vœux du Club de la presse de la Loire ne m’a pas valu que des amitiés. Il a le mérite d’être l’exact reflet de ma pensée et de la direction que je souhaite impulser à Pourparlers V 2 😛
Ca veut dire quoi être un Charlie collectif OJD à Saint-Etienne? Moi, je crois que que la 1ere vraie question est entre liberté d’expression et le sens des responsabilités.. Personne ne peut faire Tartuffe là-dessus. L’actualité récente stéphanoise offre des exemples où des questions se posent de cette dialectique entre liberté d’expression et une certaine éthique de la responsabilité. Comment est-ce qu’on traite l’interdiction du spectacle de Dieudonné ? Comment est-ce qu’on aborde la volonté de dépeindre le Géant ? Comment on analyse les réactions à l’article du Monde ? Comment on lit l’article de Loic Todesco sur transparence sur le prix des vœux du Maire ? Ou de Florence Banrolla sur le Prix du concert de France Bleue au Zenith ? On ne peut pas faire comme si ce débat n’était pas aussi ici. En plus ce débat, il n’est pas qu’interne aux rédactions, ni en dialogue avec les élus. C’est un triangle où les citoyens dans leur diversité doivent être entendus. Mon 1er sentiment est qu’au delà du devoir d’informer, on nous demande d’être dans de la pédagogie, et dans la vigilance un peu comme des instituteurs de la République qui armés de la fameuse devise liberté, égalité, fraternité serait aussi capable de dire là au nom des valeurs de la République « On s’indigne »! Sans tomber dans le « Tous pourris ». Il me semble qu’il y a beaucoup de questions à se poser sur le sentiment d’insécurité par exemple ! Il y a une pédagogie de la Liberté d’expression et de la responsabilité à avoir au service du vivre ensemble ! Sur quelle pédagogie, sur quelles valeurs, on s’appuie là-dessus ? Les fameuses bonnes nouvelles, c’est la demande d’une partie du lectorat.
Ca veut dire quoi d’être Charlie aujourd’hui dans la Loire ? Devoir d’insolence, d’ irrévérence, devoir d’esprit critique. C’est une tradition de la presse d’aller gratter là où il y a du pouvoir, du secret, des combinazione. Il faut avoir les reins solides. Certains journalistes savent ce que c’est que d’avoir des pressions, d’avoir attaqué un nœud de pouvoir, ou égratigné un Lobby. Ca peut aussi être un devoir d’avoir aussi un peu d’humour. J’ai pensé à Michel Clavel qui avait payé sa place pour un titre « Saint-Etienne affiche ses parties zénithales ». Jusqu’où les « puissants » locaux peuvent-ils accepter d’être éventuellement brocardés ou titillés ? A Lyon , ils ont les Potins d’angèle, héritier de Guignol. On a eu le Chat Botté à Saint-Chamond. Jusqu’où est-on prêt tous collectivement à relever ce défi ? Les journalistes individuellement peuvent-être courageux. Est-ce que les rédactions sont prêts à les suivre, quitte à devoir assumer un procès en diffamation ?
Ca veut dire quoi d’être Charlie aujourd’hui dans la Loire ? Est-ce que ce n’est pas oser aussi l’indignation ? Révéler ce qui peut être scandaleux ? Je pense Le scandale n’est jamais là où on l’attend. Il y a le scandale de provocation et le scandale de révélation qui ouvre les yeux, amène à un progrès des consciences, peut-être un progrès social parfois. Pour moi au quotidien, à Saint-Etienne, dans ma rue, il y a le scandale de voir des enfants dans les rues de saint etienne vider des poubelles. C’est mon scandale à moi ! Chacun aura son scandale de provocation ou de révélation ! Si je peux dire je suis Charlie, c’est à la suite de Charlie Pour dire comme disait Hessel « Indignons nous » !
Ca veut dire quoi d’être Charlie aujourd’hui à Saint-Etienne ? Je vais être très clair là-dessus. Les images de « Charlie » étaient scandaleuses pour une partie de nos concitoyens. C’est une réalité qu’on ne peut gommer ! Beaucoup de jeunes des quartiers n’étaient pas à la Marche blanche. Pourquoi ? La société est très clivée. Est-ce que nos médias reflètent bien la diversité de la population ? Est-ce qu’au moins on est capable de dialoguer avec ceux qui ne pensent pas comme nous ? Et surtout sur quelle base ? Quelles tribunes donner ? Quelles réactions avoir ? Alors, moi, bien modestement et de là où je suis, je propose qu’on se pose, journalistes, communicants, élus républicains, mandataires de l’autorité de l’Etat avec quelques questions. Quel sens de la responsabilité de la presse ? Quels moyens pour assurer une vraie indépendance de ton ? Quel soutien à la diversité des médias ? Quel seuil de tolérance et à quoi ? Comment être en prise avec le pays réel ? Peut-être cela peut-il s’insérer dans les assises de la démocratie locale.
Discours aux vœux du Club de la presse de la Loire le 22 janvier 2015